dimanche 29 août 2010

Dans la forêt

Nous sommes partis ce matin "à la fraîche", pour essayer de voir quelques insectes dans une vieille jachère ... Le soleil s'était déjà levé, mais la lune traînait encore ... et l'air était frais !


Certainement trop frais pour les insectes : nous avons beau écarquiller l'oeil et retenir notre souffle, seul un papillon tout abîmé dort dans la rosée ... La jachère a d'ailleurs disparu, remplacée par une prairie sauvage piquetée de jeunes bouleaux. Nous empruntons le chemin qui nous mène dans la forêt ... et nous pénétrons dans un monde d'ombres et de lumières.

Les oiseaux pépient déjà, et l'on reconnaît sittelles, mésanges, fauvettes ... Un merle farfouille un peu plus loin dans un tas de feuilles sèches. Un petit pic martèle un tronc, juste interrompu par notre intrusion. Nous marchons dans l'odeur du sous-bois, putréfaction, moisissure, champignons ...

En voilà un qui à la faveur d'une tache de soleil perce l'humus et surgit , tel un troll avec son chapeau pointu.

Ceux-ci paraissent nés pour l'ombre et leurs couleurs vénéneuses les camouflent à merveille.

Dans une sapinière, cette danseuse a échappé au piétinement des champignonneurs  protégée par un tronc contre lequel elle a eu la sagesse de s'appuyer.

Nous tournons dans des sentes grasses, les herbes craquent sous nos pas, toute gorgées d'eau. Une clairière s'ouvre et nous dominons les arbres sans voir la rivière que l'on sait couler entre le village et nous.

Nous admirons encore le piège de l'araignée qui brille dans les buissons et pendant que nous nous laissons tenter par les mûres, un rauquement sourd,  juste au-dessus de nous, dans la hêtraie, nous indique la présence d'un hibou moyen duc que nous avons certainement dérangé dans son sommeil matinal. Sa plainte nous laisse longtemps silencieux, saisis par le mystère et la magie ...

Mais, lentement,  la vie moderne nous rattrape: un avion de tourisme s'exerce, des vététistes dévalent le chemin caillouteux, des coureurs ahanent. Le sort est brisé.

Sur le chemin du retour, ça bourdonne dans les flaques de soleil, les insectes sont là maintenant, mais le coeur n'y est plus, comme si nous étions gavés de tout ce que nous avons déjà vu...

lundi 23 août 2010

Nature

Découvrir en lisant son journal qu'il existe, pas loin de chez soi, une petite réserve naturelle et décider, après la sieste, d'y faire une ballade pour bouger un peu, tout en sachant que ce n'est pas l'heure idéale ... Après quelques kilomètres en voiture, nous nous trouvons plongés au coeur de la réserve, le long d'une rivière rapide que l'on entend derrière le rideau de saules et de trembles que le vent ébouriffe ...


Lors de la construction du barrage en amont, la rivière a été endiguée et le biotope a disparu. Une gravière a été exploitée pendant plusieurs années et lors de sa désaffection, la nature a lentement repris possession de ce qu'on lui avait enlevé. L'association Pro Natura s'est portée acquéreur de la gravière et le biotope est désormais sous protection. De petites mares sont créées pour permettre aux batraciens de se reproduire, la roselière est entretenue pour qu'elle n'envahisse pas les étangs, et l'on a introduit un petit troupeau de vaches des Highlands pour lutter contre l'embuissonnement.
Beatnik des prairies, grandes cornes, oeil si doux
Une fois les données techniques assimilées, nous partons à la découverte, en suivant des sentiers paillés à travers les mares et les roseaux. Et c'est une découverte de tous les instants. Malgré l'heure peu propice, nous rencontrons le petit monde du marais : libellules, grenouilles, escargots, araignées et ... moustiques. Il fait un peu lourd, les rafales de vent se sont calmées, les roseaux crissent doucement, un canard cancane au loin ... Coupés du bruit du monde des hommes, nous avançons dans un domaine de  terre grasse, d'herbes vertes, de buissons enchevêtrés. Nous baissons la voix pour attirer l'attention sur une fleur, une plante, un insecte. Les grenouilles ne s'enfuient que pour punir notre oeil qui n'a pas su les voir avant que le plouf ne nous surprenne ...
Grenouille verte (Rana esculenta)
Les libellules nous précèdent sur le chemin, éclairs rouges, bleu lavande ou vert jaune. Au-dessus de l'eau, perchées sur les roseaux, elles guettent leur proie.
Sympétrum sanguin et "son" araignée
Au détour du chemin, un taillis de ronces abrite une rainette, lisse comme un galet, bien camouflée dans les feuilles. Longtemps, elle se laisse admirer, nullement gênée par nos exclamations chuchotées d'émerveillement devant sa perfection.
Rainette verte (Hyla arborea)
Enfin, un chemin gravit une petite colline et nous mène à un observatoire qui surplombe la réserve. Un faucon crécerelle survole rapidement la roselière, j'ai juste le temps de l'admirer. C'est la première fois que je vois cet oiseau "du dessus" ... Très court, mais le gris ardoise des rayures de sa queue reste gravé dans ma mémoire.
Depuis l'observatoire, vue sur une mare
Adossés à l'abri, nous écoutons les bruits de la roselière, le canard appelle toujours là-bas, le pépiement d'un oiseau attire notre attention et là, en contrebas, dans le sureau, une fauvette se régale...

Nous la laissons à ses agapes et lentement nous prenons le chemin du retour, nous promettant de revenir bientôt sur le chemin des marais ...

lundi 16 août 2010

Glaïeul

Glaïeuls des moissons, dans un parterre d'herbes aromatiques, à Oléron
Comment peut-on, d'un lutin coloré et espiègle, faire un sieur empesé et triste ? C'est l'histoire du glaïeul ... D'un joli sauvageon qui se glisse partout et dont,  à force d'hybridations et de sélections, on a réussi à faire un monsieur raide et prétentieux.

Glaïeuls des moissons associés à un Phormium, toujours à Oléron
Je ne lui trouve pas beaucoup de qualités : mettez le au jardin, vous aurez des tiges couchées au moindre vent, écrasant leurs voisines, de longs épis mal formés, des feuilles tâchées ... Il n'est pas si facile de culture,  il lui faut de la chaleur au démarrage alors que juin n'est plus aussi ensoleillé; il attrappe ensuite des viroses qui tâchent ses feuilles coupantes, il n'aime ni les étés pluvieux ni les trop grandes chaleurs ! Les boutons de la cime ne sont pas encore ouverts que les fleurs de la base pendent lamentablement et que la tige commence déjà à jaunir ! Vous aurez compris que ce n'est pas la fleur que je préfère.

Culture  pour la vente
Bon, alors, faites-en un bouquet. Quoi, une gerbe droite dans un coin du salon ? Un peu conventionnel, non ?

Mais ...Regardez de plus près : la fleur elle même, la fleur toute seule, elle, est bien découpée, son coeur est légèrement constellé, parfois un peu clair, parfois un peu sombre. Délicate, c'est vrai. Vous ne sentez rien ? Bien non, même le parfum lui manque.


Alors,  la couleur ? Là, d'accord, c'est un champion : du plus tendre coloris blanc rosé au rouge cardinal, en passant par des oranges fluorescents, des jaunes citron, des bleus lavande et des violets somptueux. C'est elle qui me fait parfois craquer ...


Finalement, c'est coupé court que je le préfère. Là, il perd de sa superbe et redevient fleur, tout simplement.

jeudi 12 août 2010

Pâtisson

Ayant craqué au marché pour ce beau légume-fruit, au toucher si velouté, je me suis mis à la recherche d'une nouvelle recette. Rien de bien neuf, sur le net. J'ai opté finalement pour une cuisson du légume entier suivie d'une friture légère en tranches.
Surprise : après 20 minutes de cuisson, l'intérieur était réduit en purée, et la peau encore coriace ! Impossible donc de le couper en tranches.

Désireuse de garder au maximum la saveur subtile du pâtisson, j'ai renoncé à le gratiner avec force fromage, oeuf ou crème. Mais je ne voulais pas non plus qu'il reste fade, il fallait le "réveiller". J'ai donc imaginé la recette suivante :

Ingrédients pour 2 personnes:
1 gros pâtisson
1 bouquet de basilic, sel, poivre
1 poivron séché (ou du paprika poudre)
300 gr de viande de porc (faux filet ou cou)


Faire cuire le pâtisson à l'eau, en entier, pendant 20 minutes.
Le couper en deux par le travers, enlever les pépins et conserver la chair dans un tamis pour la laisser égoutter après l'avoir écrasée à la fourchette. Réserver les "coques" de pâtisson.
Couper le basilic en réservant les têtes pour la déco, émietter le poivron séché. Mélanger au pâtisson.
Couper la viande en petits cubes et l'assaisonner de haut goût avec du poivre et le poivron ou le paprika
La faire rissoler à feu vif dans un peu d'huile d'olive. Saler.
Dès qu'elle a pris couleur, verser le pâtisson mêlé au basilic, mélanger le tout, laisser "sécher" pendant quelques minutes  la purée de pâtisson.
Farcir les coques du pâtisson, décorer avec basilic et poivron séché. Servir avec du pain turc, du riz, des pommes de terre rôties.


Pour notre part, nous l'avons mangé sans accompagnement, pour un dîner léger ... Petit vin rouge de pays ... et nous nous sommes régalés.

mercredi 11 août 2010

Fleuriste en plein champs

Depuis plusieurs années, se sont développés dans ma région des jardins où l'urbain peut venir cueillir lui-même ses fruits, ses légumes ou ses fleurs. Cette forme de marché a commencé, il y a longtemps, par des champs de fraises, de framboises ou de haricots. Le coup de la main d'oeuvre étant un facteur aggravant du prix des denrées premières, chacun y trouve son compte. On voit d'ailleurs des familles entières venir y faire leurs "courses" ... Les champs de fraises sont les premiers ouverts, suivis par les haricots, framboises et autres petits fruits, pour se terminer par le marché des courges !
Moi, ce qui m'intéresse, ce sont les jardins de fleurs !

Une pancarte artisanale au bord de la route, ces jardins se signalent surtout par la profusion ... Les fleurs poussent là, en vrac, sans souci de paraître, juste avec l'ambition de résister aux orages et aux pluies. Un champ de fleurs ... c'est  le rêve !

J'aime y aller faire un bouquet, comme si j'étais dans mon propre jardin qui aurait gagné quelques ares. En rentrant d'une balade, je m'y arrête, pas trop loin de chez moi pour que les fleurs ne souffrent pas ... Avec délice, j'emprunte un sécateur, et déjà dans ma tête, les couleurs et les formes se marient pour imaginer un bouquet champêtre, un peu rustique, un peu naïf.

La terre lourde colle aux souliers, les chemins sont paillés, quelques plantes ont été abîmées par des clients peu connaisseurs, ou peu soucieux ... Là, les glaïeuls, tout raides, pas encore ouverts complètement, là les longues tiges souples des cosmos, les gueules de loup, plus loin les dahlias... l'oeil papillonne, le nez frémit : trop d'émotions.

Est-ce de l'avidité ? Je voudrais faire mille arrangements ... Chaque fleur fait naître dans mon esprit surexcité une association, une possibilité d'accord avec une herbe, une couleur ...


Certaines jardinières savent varier leur offre et introduire des espèces moins connues sous nos latitudes ou de nouveaux hybrides, ou même des feuillages colorés ... Elles mêlent savamment leurs plate-bandes, reléguant tournesols et gros dahlias à l'arrière plan, laissant les plantes plus frêles en avant plan. Les roses et les lys sont à côté de la sortie, pour une dernière tentation.

La confiance est de rigueur, les prix sont affichés et chacun fait son compte et verse son dû dans la caissette prévue à cet effet. Il faut croire que cela fonctionne et que ces jardins sont rentables, car, à mon plus grand plaisir, ils se multiplient dans les alentours.

Je reviens chez moi les bras chargés de merveilles qu'il ne me reste plus qu'à rafraîchir avant de prendre mon temps pour composer ...

vendredi 6 août 2010

Moissons


Partis pour une ballade à travers la campagne, nous n'espérions pas faire une si belle moisson ... d'images. Car pendant que nous nous amusions, d'autres travaillaient, malgré le jour de la fête nationale, et malgré le dimanche. L'orage menaçait et la lumière qui ravissait les photographes n'était pas de bon augure pour les blés.



Le temps était lourd, et le ciel bleu ou gris, mais toujours minéral, avec dureté. Les criquets stridulaient dans l'après-midi vibrant. Pas un papillon, quelques mouches importunes ... Les forêts paraissaient noires, tant le jaune des champs écrasait le vert. Le champ crissait sous nos pas et les sauterelles s'enfuyaient dans des arcs crépitants.

Plus loin, dans la chaleur poussièreuse, les machines travaillaient, monstres de métal, avalant leur pitance et déféquant de gros rouleaux animant le paysage. Les hommes semblaient absents ... mais nous n'avons pu nous empêcher de penser à leur dur labeur, dans les débris piquants de la paille et de la sueur.


Longtemps, nous avons tourné, tantôt sur le versant nord, tantôt sur le versant sud de la vallée, sortant de la voiture fraîche pour photographier, et pour faire quelques pas dans l'air raréfié, la tête et les membres lourds de tant de chaleur accumulée. Jusqu'au soir, nous nous sommes émerveillés de cette lumière, de ces paysages et de ces ciels changeants.


Après quelques roulements de tonnerre, l'orage a finalement éclaté dans la soirée, balayant lumière, chaleur et poussière.


jeudi 5 août 2010

Terrasse

La terrasse, le symbole de l'été, des vacances, du farniente...

Je l'aime au petit matin, encore vide, dans la ville qui commence à s'agiter, pour un petit café contemplatif , jusqu'au soir,  avec ses hordes de rieurs, pour un verre de vin rouge.


Il y a  la terrasse sans façon, mobilier métallique qui racle le goudron du trottoir, parasols multicolores,  avec la sommelière fatiguée, pas particulièrement souriante, juste polie, qui voudrait bien retourner à l'ombre ou qui peste contre le surplus de travail occasionné par ces tables supplémentaires. Il fait bon s'y asseoir  dans la chaleur de l'été pour regarder passer les gens pressés, ceux qui travaillent, ceux qui font leurs courses, ceux qui sont pris dans le tourbillon de leurs occupations. Je m'accorde une pause, les bras sur la table métallique chaude, je m'amuse du spectacle des passants ... La boisson fraîche pétille dans mon verre, citronnée, et la cigarette allumée par plaisir se consume lentement ...


Il y en a bien sûr la terrasse prétentieuse, avec parasols géants, barrière protectrice - de quoi, de qui ? - où l'on mange des glaces plus grosses que savoureuses à la cuillère, avec nappe et serviette. Les serveurs s'agitent sans se presser, avec le déhanché nécessaire, les gens chuchotent, et c'est comme si l'intérieur du restaurant avait été transféré à l'extérieur, à contrecoeur, sans vraiment vouloir profiter du soleil et de l'été.


Et il y a ma terrasse préférée, la presque clandestine, collée contre la grande vitre du café, deux places qui font face à la rue, le parasol de guinguois qui n'abrite pas la table - ni les chaises d'ailleurs. Il fait bon s'y arrêter, ramener les jambes sous soi pour ne pas gêner le passage d'une poussette d'enfant, regarder la rue vivre. Laisser passer le temps,  ....

La vacuité est un luxe, à la portée de tous, encore faut-il savoir en profiter ! Je m'y exerce assidûment ...