Comment fuir la neige, le froid, le verglas ? Comment se réchauffer et se reposer les yeux de tout ce blanc ? J'ai une proposition à vous faire : visitez une serre tropicale. On en trouve des modestes dans les jardins botaniques, mais j'ai la chance d'avoir un papiliorama pas loin de chez moi ...
Je laisse la voiture sur le parking assez éloigné et je marche sur le chemin, la neige craquant sous mes pas. Le contraste est d'autant plus fort au moment d'entrer dans la serre. Immédiatement, buée sur les lunettes et sur l'objectif ... mais à travers ce brouillard, on perçoit déjà mille volettements, mille couleurs, et le vert, omniprésent ! Une sensation d'étouffement, bien vite remplacé par la chaleur agréable ...
Je renverse la tête pour admirer sous la voûte ces grands papillons qui planent, éclairs d'azur et d'ocre. Impossible de les photographier, ils sont trop rapides. Et surtout, je veux d'abord m'émerveiller du fouillis des plantes, de l'odeur d'humus, mon esprit bouillonnant de souvenirs que les feuilles, que les fleurs, lui rappellent. Souvenirs d'anciens jardins, et les noms scientifiques ou vernaculaires éclatent comme les bulles d'un air trop longtemps enfoui sous la couche argileuse de l'oubli ...
Sur les feuilles, les papillons se reposent et sont bien plus faciles à prendre en photos. Emerveillement devant leurs couleurs, devant leur diversité.
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Erato heliconian |
Je chemine au milieu des plantes, admirant les fleurs, et mes yeux fouillent le vert pour ne pas manquer un seul de ces joyaux. Des panneaux d'information sur leur mode de vie, leur nourriture, leur éclosion, rythment le passage, mais je ne m'y intéresse pas, bien trop occupée à ma balade en forêt tropicale.
Je reconnais une forme de "liane corail" qui poussait sur la volière dans mon jardin, mais je me retrouve piégée par l'odeur vanillée, poivrée, un peu douceâtre, de cette fleur étrange, qu'un petit arbre aux larges feuilles coriaces abrite par dizaines. Je ne connais pas encore son nom, ni sa provenance, mais jamais je n'oublierai sa prestance, son étrangeté et cette senteur particulière ...
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Caligo eurilochus |
Combien de papillons n'ai-je pas su voir ? Peu importe, la promenade me laisse les jambes lourdes, ma veste d'hiver me pèse, les cris des enfants me fatiguent soudain, et j'aspire à ... de l'air frais ! Un dernier regard à ce monde enchanté, cette jungle factice où toutes les merveilles sont réunies, sans aucun danger, à portée de l'objectif ...
Je reviendrai, je le sais, un jour où le ciel sera trop bas et la lumière trop grise !