La magie verte agit dès l'entrée dans le domaine de l'eau
Le charme de la cascade, parée de mousses et d'étincelles, laisse croire à l'enchantement et
annonce la verticalité du monde en amont. Mais l'eau, instable, joueuse, irresponsable,
passe de monts en plaines l'esprit léger et la force inépuisable. Elle forge le paysage à sa démesure, elle sculpte des stries ondulantes comme des fanons de baleine,
elle court suivant son impétuosité libérée, caressant ou frappant la pierre, pour la modeler.
Après une chute maîtrisée et gracieuse,
elle se délasse entre les pierres usées, avec de petits clapotis de plaisir,
elle se faufile dans des goulets, creusant sous elle des gouffres sans fond,
repart en flânant, créant des plages, jouant à la rivière. Elle use tout sur son passage
mais elle sait aussi éviter la pâquerette qui a choisi son lit pour fleurir.