Non, non ce n'est pas de voyage dans un pays oriental que je vous parle ... mais bien d'un voyage mystérieux, un voyage à travers les objets, porteurs d'histoires vraies ou rêvées.
Les brocantes : je les aime toutes : les cotées, avec leurs antiquaires dédaigneux; les villageoises, dans la simplicité bon enfant d'une fête populaire; les charitables, avec leurs ouvrages au crochet ...
Il y a des vide greniers modestes, avec des petits objets du ménage, des verres dépareillés, des ustensiles démodés, un tapis usé, et des brocantes plus importantes, avec des armoires de bois, des fauteuils rembourrés, une vieille moto ...
On navigue entre les stands, dans une odeur de poussière, de vieux tissu, un peu repoussante. Le regard est aux aguets, à la recherche de l'objet in-dis-
pen-sa-
ble, celui qu'il ne faut pas manquer. La démarche est ludique : faire une bonne affaire, dans le joyeux échange du marchandage, en achetant un bidule peut-être inutile, mais à bon prix ... Parfois, les prix sont affichés, la mine du marchand
rébarbataire et le verre convoité perd tout son attrait. Acheter en brocante, ce n'est pas acheter au super-marché ! L'échange objet-argent doit être accompagné d'un rituel spécifique au troc : j'y gagne, mais tu y gagnes aussi - à défaut, l'achat n'est pas intéressant et la magie n'opère pas.
Il y a des modes : les cuillers à absinthe, les bouteilles à siphon, les terrines de grès. Il y a aussi les incontournables : les vieux outils, les vieux livres, le matériel militaire, les couverts argentés ...On a tous un dada, un
graal : qui, les toiles de lin ou les dentelles, qui, les figurines de plomb ou les petites voitures... Moi, après des années de papillonnage, d'achats compulsifs de petits meubles, de saladiers, de lampes, de boîtes - et des déménagements toujours plus importants - je me suis "spécialisée" sur les vases !
Et il y a de quoi faire ! Des vases en terre, en porcelaine, en verre, en métal : combien ont été reçus, pas aimés, jamais servis ? Je les achète souvent avec l'étiquette encore ! Je les jauge du coin de l'oeil, je jauge aussi la marchande, l'allure du stand, les autres objets. Je crée le bouquet, sa forme, sa couleur ... Je me fixe un prix maximum ... puis je me lance. L'affaire se fait ou ne se fait pas, en fonction du prix, bien sûr, mais aussi de l'attitude du vendeur...
Mais ... on ne revient pas d'une brocante les mains vides : on a craqué pour un truc... petit, pas sûr que l'on s'en serve, mais bon ... Évidemment, il y a les coups de foudre : alors là, plus rien de ludique, ni de raisonnable : ça ne se discute pas. Il nous le faut !
Mais c'est chez soi que l'on apprécie enfin sa trouvaille : lui redonner son éclat, la mettre en valeur ... On finit par l'aimer comme s'il nous avait toujours accompagné.
Malgré les étagères pleines, les recoins où l'on empile les objets en attendant de les utiliser, les promesses que l'on se fait, la culpabilité devant l'accumulation, la chine ne perd jamais de son attrait !