Nous sommes partis ce matin "à la fraîche", pour essayer de voir quelques insectes dans une vieille jachère ... Le soleil s'était déjà levé, mais la lune traînait encore ... et l'air était frais !
Certainement trop frais pour les insectes : nous avons beau écarquiller l'oeil et retenir notre souffle, seul un papillon tout abîmé dort dans la rosée ... La jachère a d'ailleurs disparu, remplacée par une prairie sauvage piquetée de jeunes bouleaux. Nous empruntons le chemin qui nous mène dans la forêt ... et nous pénétrons dans un monde d'ombres et de lumières.
Les oiseaux pépient déjà, et l'on reconnaît sittelles, mésanges, fauvettes ... Un merle farfouille un peu plus loin dans un tas de feuilles sèches. Un petit pic martèle un tronc, juste interrompu par notre intrusion. Nous marchons dans l'odeur du sous-bois, putréfaction, moisissure, champignons ...
En voilà un qui à la faveur d'une tache de soleil perce l'humus et surgit , tel un troll avec son chapeau pointu.
Ceux-ci paraissent nés pour l'ombre et leurs couleurs vénéneuses les camouflent à merveille.
Dans une sapinière, cette danseuse a échappé au piétinement des champignonneurs protégée par un tronc contre lequel elle a eu la sagesse de s'appuyer.
Nous tournons dans des sentes grasses, les herbes craquent sous nos pas, toute gorgées d'eau. Une clairière s'ouvre et nous dominons les arbres sans voir la rivière que l'on sait couler entre le village et nous.
Mais, lentement, la vie moderne nous rattrape: un avion de tourisme s'exerce, des vététistes dévalent le chemin caillouteux, des coureurs ahanent. Le sort est brisé.
Sur le chemin du retour, ça bourdonne dans les flaques de soleil, les insectes sont là maintenant, mais le coeur n'y est plus, comme si nous étions gavés de tout ce que nous avons déjà vu...