mardi 22 juin 2010

Chambre d'hôtel

A l'entrée de l'hôtel déjà, l'odeur  vous prend à la gorge. La réception est vide ...  Votre regard fait le tour de la pièce sombre, note les vieux fauteuils postés devant le poste de télévision éteint, détaille  le tableau en tapisserie ou le puzzle collé, les bibelots sur un meuble, les journaux sur la table basse.  Votre nez s'habitue à l'odeur rance de vieux tissu, de journal humide, de sauce en boîte qui flotte à l'arrière plan. Une radio passe de la musique, assourdie, quelque part.
Le réceptionniste indifférent remplit les papiers, vous donne la clef et les instructions habituelles d'une voix étouffée, bien dans l'atmosphère du lieu. Une porte s'ouvre dans les étages, un éclat de voix, puis à nouveau le silence...
Ensuite, dans l'escalier tapissé de moquette, vous vous demandez si vous allez rester... A l'ouverture de la chambre, dans la pénombre, cela vous semble moins insupportable, malgré l'odeur de tabac froid. Déposant votre bagage, vous vous précipitez pour ouvrir la fenêtre ... Arrière cour, léger bourdonnement émanant de la cuisine, en contrebas. Gênant ? Oui, non, ça ira. Il est tard, vous êtes fatigué, vous allez pouvoir dormir.

Le lit est blanc, bien tiré, les draps craquent sous la main. Lentement, vous ouvrez votre sac, suspendez quelques habits, déposez un livre et  votre téléphone sur la table de nuit. Fenêtre entrouverte, rideaux tirés ... Ah ! la lampe de chevet fonctionne : vous êtes paré pour une éventuelle insomnie.
Les sanitaires vert acide, le carrelage brun terne, la moquette caca d'oie : la déco n'est pas d'aujourd'hui. Bon, la douche est propre ... les serviettes bien pliées, les verres sous film plastique.
Tout affairé à votre cérémonial du coucher, vous ne voyez pas encore le papier peint tâché, usé, les peintures rayées, la gravure à la tête du lit ... Ce n'est qu'une fois allongé, que vous constatez les tâches d'eau au plafond - tiens, est-ce qu'à l'étage, la douche n'est pas au même endroit ? - la couleur infâme, orange, de la corbeille à papier. Tiens, la chambre à côté a l'air d'être occupée : la télévision bourdonne.
Combien de personnes ont déjà dormi dans cette chambre ? Des représentants de commerce, des habitués, des gens de passage pressés, comme vous ?
Votre esprit divague agréablement, votre nuque apprivoisant l'oreiller un peu plat, et vos membres jouissant de la fraîcheur du drap. Le sommeil arrive par vagues, les bruits de la maison inconnue s'éloignant progressivement...
 
Au réveil, sous la lumière accusatrice, le décor vous semble impossible et c'est rapidement, après une douche tonique,  que vous rassemblez vos affaires, refermez vos bagages ... Dehors, vous respirez longuement dans la fraîcheur, l'air piquant lavant les remugles de la nuit.
Et c'est d'un bon pas que vous partez à la recherche d'un bar pour votre premier café.

8 commentaires:

  1. Un billet qui fait écho à ces arrêts toujours un peu tristes dans des chambres d'hôtel souvent décevantes : décor désuet, voire négligé, sommeil difficile et solitude prégnante...
    Heureusement, il y a le café du lendemain matin...

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  2. Le lecteur est vraiment tenu en haleine ...
    Quel est ce roman noir ?
    Rien ne vaut son lit, son jardin ... j'ai toujours une appréhension à partir ...

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  3. Ambiance glauque mais récit haletant !
    Cela me rappelle une halte forcée en Haute-Loire, sur le plateau, car le col qui permettait de redescendre sur l'Ardèche était fermé pour cause de grosses chutes de neige un 15 Avril !,l'hôtel sans étoile, la salle de restaurant transformée en cantine à cause du nombre de "naufragés" et la chambre ... j'ai "dormi" habillé. Pouah !

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  4. Quelle description! J'ai vécu quelque séjours hoteliers du même genre. Désolation et à la limite du dégoût. Beurk, on s'en passe, quoi!

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  5. On a tous dû dormir, une fois ou l'autre, dans cette chambre ! Et au matin, on n'avait pas envie de prendre le déjeuner sur place, non ?

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  6. Parce qu'en plus ils ne servent même pas les petits déjs ?

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  7. Vite dehors. Oublier tout cela. C'est un cauchemar, il faut effacer les mauvais moments. Un deuxième café peut être ? Bon jeudi et à bien vite

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  8. Plusieurs petits cafés ... Non, le dimanche, il y a pas de petits déjeuners ! Et que vous dire ? On sait que l'on recommencera, un soir de vadrouille, de grande fatigue ... Comme dirait Adiante, rien ne vaut son lit, et j'ajouterais : à part les voyages !

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